Marine Joatton

Peintre

Entretien radiophonique avec Marine Joatton

par Claire Colin Collin et Sylvain Roche | In situ

Quand quelqu’un veut visiter mon atelier, je le mets en garde, je raconte que c’est une grotte constellée de peinture ! En général, ça ne fait pas peur, au contraire, cela attise la curiosité…

Mon atelier est à la fois un lieu de travail et de stockage. J’y suis depuis douze ans et étant très productive, j’y ai accumulé beaucoup de travaux qui sont rangés avec plus ou moins d’ordre ou de fantaisie.

A la manière de ma peinture qui peut parfois paraître baroque, l’atelier est une grotte dont le sol et le mur, qui me servent de support pour peindre, sont maculés de peinture. Aux cadres colorés qui se superposent comme autant de traces limites de la toile ou de la feuille de papier, s’agglutinent des boucles de mélange pictural. Aux abords de ce mur, véritable poumon de l’atelier, se dressent des « tas » de cadres et de toiles, protégés par des bâches.

Perpendiculaire à ce mur, une table palette ondule sous un atlas de bosses et d’anfractuosités aux mille et une couleurs. Dans ce dédale savamment organisé, fusent des couleurs fluo à peine sorties du tube.

Les visiteurs que je n’ai pas réussi à effrayer et qui franchissent la porte de l’atelier sont aimantés par cette palette qui déborde d’un nectar coloré lourd et subtil. Il y a quelques années, je désespérais de ne pas parvenir à convoquer une telle luxuriance sur la toile. 

Mon atelier est très sommairement équipé; une chaise, trois tabourets, tous réceptacles d’années de pratiques picturales. Chaque ustensile participe à l’activité frénétique qui se déploie au creux de ce chaudron quasi industriel et guère confortable.

Un couloir étroit, recouvert d’étagères chargées d’œuvres de différentes époques, conduit au lavabo tout gris dans lequel je lave chaque matin mes pinceaux avant de me mettre au travail.

Enfin, l’atelier abrite une courette à ciel ouvert dans laquelle se dresse une cabane de jardin qui abrite des toiles anciennes recouvertes de peinture à l’huile en croûte particulièrement épaisse…

Le toit de la cabane est recouvert de lierre et de chèvre-feuille, et la courette est le terrain de jeu et d’envol de pigeons qui accompagnent mon aventure en solitaire.

Marine Joatton